Quartier du Séqué, Bayonne, 27 avril 2020, 9H45
Alertées par une pelleteuse en pleine action de destruction de la végétation d’une haie bocagère en face de leurs fenêtres, des citoyennes sortent de chez elles, malgré le confinement et vont questionner l’ouvrier sur ce qu’il est en train de faire.
En effet, la haie, fraîchement détruite sur une dizaine de mètre, malgré la période de nidification en cours, est théoriquement protégée par le plan local d’urbanisme (PLU). Quelques coups de téléphone plus tard, un bref rendez-vous improvisé réunit sur place un responsable de la mairie de Bayonne et un responsable de l’entreprise privée, mandatée par la Mairie de Bayonne justement pour récupérer de la terre végétale sur le terrain communal derrière la haie afin de réaliser des plantations en centre ville.
Un « petto » (petite erreur en langage local) est rapidement reconnu : pour un aspect pratique (difficulté apparente pour les camions dans la traversée du terrain et proximité avec la route de l’endroit où la terre est prélevée), l’entreprise a jugé plus judicieux de procéder de la sorte. Le fonctionnaire territorial et le responsable de l’entreprise privée proposent assez rapidement de replanter une haie, une fois les chargements terminés. On pourra remercier ces citoyennes de leur vigilance, grâce auxquelles, une restauration hypothétique de cette haie bocagère, réserve de biodiversité, verra peut-être le jour. Même si, une “réparation” n’est bien sûr jamais complète dès qu’on s’attelle à abîmer un élément naturel, quel qu’il soit.
L’histoire aurait pu s’arrêter là.
Dans l’intermède des divers échanges pour clarifier la situation, c’est un camion un peu spécial qui est venu décharger lui, son contenant, sur le terrain vague. Intrigué par cela, nos deux citoyennes rejointes par un autre habitant du quartier, vont découvrir un trou béant, fraîchement réalisé, et à côté, deux tas de déchets de voiries, fraîchement déposés, qui n’attendent plus que quelques coups de pelleteuse pour être discrètement enfouis. Nous avons constaté leur disparition et les trous rebouchés (cf dernière photo horodatée 18h27 ). Sans parler de l’étendue des dépôts sauvages et autres déchets trouvés sur l’ensemble de la parcelle.
Que tirer comme conclusions de tout cela ?
Certains espèrent un monde d’après, différent du monde d’avant. Au-delà de l’épisode d’une entreprise qui se hâte un peu vite sans prendre le temps de vérifications réglementaires préalables, c’est plus la situation de ce terrain qui interpelle. Convoité par les promoteurs immobiliers, son statut était en passe d’être modifié pour être prochainement constructible. C’est encore grâce à la vigilance citoyenne du collectif « Stop Béton Bayonne » que cela reste pour l’instant en suspens, dans le contexte des élections municipales et du Covid 19. Dans l’attente, ce terrain, au milieu d’un éco-quartier virtuel, sert de décharge au secteur du BTP communal ou à a minima de zone de transit, avec des enfouissements (clandestins?), via des autorisations administratives très probablement virtuelles elles-aussi, tout cela sans aucun contrôle pendant cet état d’urgence sanitaire. La mairie est-elle au courant ? Le CADE attend une réponse depuis la fin du mois de février.
En ces temps de confinement, l’économie ne demande qu’à reprendre son cours, surtout quand elle peut se passer de la vigilance des associations de défense de l’environnement, les acteurs du CADE étant consignés à domicile, contrairement aux acteurs économiques. Et que par ailleurs, l’État confine les normes environnementales. Au delà des espérances, force est de constater que les forces politiques et économiques ne connaissent qu’un seul modèle, celui-ci qui nous amène tout droit à un effondrement de la biodiversité, un effondrement climatique, et finalement à un effondrement des sociétés thermo-industrielles.
Nous sommes trop peu nombreux et trop faibles pour affronter les forces de destruction, mais nous pouvons encore essayer de créer des îlots de résilience. Il est clairement trop tard pour sauver « le monde » tel que nous le connaissions. De toute façon, nombre de ses aspects sont à bannir.
Pour celles et ceux qui veulent œuvrer à la réalisation d’un imaginaire positif, les Kolapsonautes vous proposent de participer à la mise en réseaux d’éco-lieux, de villages sobres, autonomes, résilients, autogérés et interconnectés.